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L’ESG émerge dans les portefeuilles des clients
FOCUS SUR LES MI-OCTOBRE
 2020 PAGES 14-17
CONSEILLERS
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     Or, ces facteurs restent marginaux.
PAR GUILLAUME POULIN-GOYER
bon nombre de conseillers
restent réticents à utiliser des produits qui choisissent leurs placements en fonction de cri- tères environnementaux, so- ciaux et de gouvernance (ESG). Or, ils risquent de l’être moins dans les prochaines années.
Voilà ce que démontrent les sondages menés à l’occasion du Pointage des courtiers québécois de 2020 et du Pointage des cabi- nets multidisciplinaires de 2020.
À ces deux types de conseil- lers on a demandé quel pourcen- tage de leur actif géré est orienté vers des stratégies ESG. Tant les conseillers en placement que les conseillers liés à un cabinet mul- tidisciplinaire en avaient une part médiane de 2%.
La part moyenne en ESG pon- dérée en fonction de l’actif géré s’élève à 15,6 % pour les conseil- lers en placement et à 5,7% pour les conseillers liés à un cabinet multidisciplinaire. Les conseil- lers faisant partie du segment des 20 % qui génèrent le plus de revenus dans leur catégorie ont tendance à avoir une part moyenne pondérée en ESG supé- rieure à celle des autres 80 %. Voir le tableau « Profil des conseillers, selon le secteur d’activité, en 2020 » en page 15.
Notons toutefois que seulement 58% des conseillers en placement et 65% des conseillers liés à un ca- binet multidisciplinaire que nous avons sondés avaient au moins une partie de leur portefeuille dans les stratégies ESG. Parmi ceux-ci, la moyenne simple des proportions de l’actif en ESG des conseillers en placement était de 21% et celle des conseillers multi- disciplinaires, de 6,5%.
Parmi les conseillers en pla- cement sondés, quelques-uns avaient la totalité de leur actif orientée vers l’ESG, alors que chez les conseillers multidiscipli- naires, les plus orientés vers l’ESG en avaient une part de 33%.
L’analyse des commentaires des répondants montre qu’un segment d’entre eux restent sceptiques. « C’est de la bouillie pour les chats! Il y a des banques là-dedans, des banques qui in- vestissent dans les armes à feu ! » dit ce conseiller qui n’a aucune pondération en ESG. « Je crois qu’il y a beaucoup de marketing là-dedans. C’est beaucoup de la poudre aux yeux», ajoute un autre.
«Plein de fonds sont désignés ESG, mais c’est beaucoup de la frime », selon un conseiller qui a
pourtant 60 % de son actif géré en ESG.
Finance et Investissement a regroupé les autres répondants en fonction de leur attitude à l’égard des facteurs ESG. Une partie des répondants n’y ac- cordent aucune importance, d’autres ont des doutes quant à leur pertinence, alors que cer-
pas de type ESG », indiquait iA Groupe financier, société mère d’Investia Services financiers, en mai dernier.
Quelques dirigeants de cour- tiers soulignent l’absence de normes entourant l’ESG. L’éven- tail de méthodes de classement est large, varié et souvent propre à chaque créateur d’indices ou
la demande relativement faible en produits ESG : « Les clients en ont assez de faire du recyclage, d’im- primer moins, de faire les lunchs. C’est beaucoup de travail d’être socialement responsable et les in- vestissements, c’est un peu en bas de cette échelle [des priorités]. »
Or, tous les dirigeants inter- rogés anticipent une croissance de l’actif en ESG et s’adaptent à la tendance. « On a des comités ESG et on essaie de guider la pa- rade. Notre service de gestion de portefeuille regarde comment articuler l’ESG et le faire vivre, mais c’est encore un segment de l’investissement en définition, et c’est ça le problème », a mention- né Denis Gauthier.
Chez RBC DVM, on observe aussi le développement accéléré de ce secteur, notait Jérôme Brassard: « C’est absolument nécessaire d’exceller sur ce terrain. Nos in- vestisseurs actuels et [ceux]de de- main vont être très critiques sur notre façon d’être des entreprises citoyennes et sur notre façon de choisir les investissements qui connectent avec leurs valeurs.»
L’industrie est mûre pour se mettre à offrir des produits so- cialement responsables, consi- dérant que certains clients les demandent, affirmait Mary Hagerman, gestionnaire de porte- feuille et conseillère en placement chez RJ, en juin. Toutefois, la ré- cente volatilité des marchés cau- sée par la pandémie pourrait avoir freiné cette tendance : « Les gens sont plus réceptifs à ce type de produit dans un marché haussier que [dans un marché] baissier », disait-elle.
La performance des produits ESG durant le dernier marché
baissier constituera un pre- mier test pour bon nombre de ceux lancés récemment et elle risque d’alimenter les discus- sions avec les clients, selon Mary Hagerman : « Si on démontre que les filtres ESG ne compromettent pas le rendement, les clients se- ront plus enclins à écouter les ar- guments de l’ESG, et les conseil- lers, à faire un effort additionnel pour éduquer leurs clients et bâtir des portefeuilles avec ces produits. »
L’intérêt marqué pour l’ESG chez les investisseurs institu- tionnels fera que la distribution de détail devra emboîter le pas, estimait Jean Morissette, consul- tant auprès de l’industrie de la gestion de patrimoine, en juin : «Aujourd’hui, il n’y a plus un in- vestisseur institutionnel qui n’a pas [de filtre ESG] dans ses po- litiques. L’industrie du conseil va suivre, c’est une question de temps. »
Lorsque des investisseurs ins- titutionnels délaisseront les titres des entreprises qui sont cancres en matière d’ESG, cela nuira à leur performance, ce qui force- ra les conseillers à considérer les filtres ESG, selon lui. «Ça demeure un critère à intégrer dans les pra- tiques individuelles des conseil- lers, mais beaucoup ont commen- cé à le faire», a-t-il ajouté.
Le problème de la standardi- sation des filtres ESG se réglera tôt ou tard et la demande d’infor- mations en ce sens se multiplie- ra, a dit Jean Morissette : « Des analystes ajouteront des com- mentaires et des analyses sur ce plan, parce qu’il y a un effet sur le rendement et la détermination du prix des actions. » FI
  tains déclarent que leurs clients ne s’y intéressent pas.
« Ça ne m’intéresse pas pour l’instant. J’ai assez de critères de gestion sans en ajouter un. Les gens veulent des ESG, mais ils veulent aussi du rendement ! C’est un gadget », indique un répondant.
« C’est vague aussi comme ca- tégorie. La définition est propre à chacun », estime un autre.
Or, de nombreux conseil- lers commencent à intégrer les facteurs ESG et d’autres y sont favorables.
« C’est important. On y croit, mais les ESG sont très dispen- dieux », dit un répondant. « On intègre des facteurs ESG dans notre sélection d’actions de- puis 2012 », note un autre. « C’est extrêmement important. Ce sont les plus jeunes qui ont ces valeurs-là, mais ils n’ont pas né- cessairement le plus d’argent. Il faut sensibiliser la clientèle plus âgée », souligne un troisième.
UNE VAGUE DE FOND
Les patrons des divers réseaux de conseillers partagent généra- lement le constat suivant à l’égard des produits ESG: ils sont peu ré- pandus, car ils sont peu deman- dés et peu standardisés. Or, l’in- vestissement ESG constitue une vague de fond qui finira par se répandre largement à long terme.
« L’ESG est une catégorie d’in- vestissement qui est principale- ment motivée par la conscience sociale et environnementale d’un investisseur individuel par rapport à celle de son conseil- ler. Au Canada, la tendance se fait progressivement sentir, notamment avec une cohorte d’investisseurs plus jeune. Pour qu’il soit plus solidement éta- bli, il faudra des preuves solides que ce type d’investissement est en mesure de suivre le rythme des performances à long terme des investissements qui ne sont
classement et une
manufacturier de produits.
« C’est un thème qui a été très galvaudé et à la mode ces der- nières années. Pour l’instant, les définitions ne sont pas claires. Une entreprise comme Apple va avoir une note de
20 % selon un
note de 80 % selon un autre », fai- sait valoir Denis Gauthier, pre- mier vice-président et directeur national à la Financière Banque Nationale, en avril dernier.
«Il n’y a pas de standards en ESG. Chacun l’interprète à sa façon. L’industrie de la finance est encore en train de l’explo- rer », observait Jérôme Brassard, vice-président et administra- teur de RBC Dominion valeurs mobilières (RBC DVM), en avril.
« Plusieurs maisons de fonds, dont Desjardins, se positionnent dans ce secteur pour répondre aux besoins des clients. Les conseillers [aimeraient qu’une] certaine certi- fication se fasse. On n’est peut-être pas rendu là et on invite nos parte- naires des maisons de fonds à ré- pondre à ce besoin», disait Michael Rogers, vice-président, ventes et distribution, réseaux indépen- dants au Mouvement Desjardins, en mai dernier.
Le profil des clients ayant le plus d’actif financier ex- plique aussi la demande re- lativement faible en produits ESG, notait Richard Rousseau, vice-président du conseil du Groupe gestion privée, Québec, chez Raymond James (RJ), en avril dernier : « Je ne sais pas si c’est une question de génération ou du fait que la richesse est en- core détenue par une population qui n’en fait pas une priorité, mais, avec le temps, ça deviendra plus important. L’industrie va grandir et certains conseillers en placement éventuellement vont se démarquer [en ce sens]. »
Comprendre les nuances entre des produits traditionnels et des produits ESG reste difficile pour le client moyen qui vise d’abord un rendement lui permettant d’atteindre ses objectifs, notait Éric Lauzon, vice-président au développement des affaires et au recrutement pour le Canada d’Assante, en mai. Cela explique
 Il n’y a plus un investisseur institutionnel qui n’a pas de filtre ESG dans ses politiques. L’industrie du conseil va suivre.
– Jean Morissette
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Bientôt un MRCC 3?
Lors de la publication de ses priorités pour l’exercice 2020-2021, l’Autorité des marchés financiers (AMF) a évoqué la poursuite
de «ses travaux sur la gestion des incitatifs des institutions financières, sur l’encadrement à l’égard des fonds distincts et quant à l’interdiction du paiement de commissions de suivi par les orga- nismes de placements collectifs». Que compte-t-elle faire exacte- ment? Les fonds distincts font l’objet d’une collaboration entre l’AMF et les Autorités canadiennes en valeurs mobilières (ACVM), afin de développer une approche commune pour la
divulgation au client de l’information relative aux coûts totaux et au rendement des fonds d’investissement et fonds distincts, révèle l’AMF. Les obligations des professionnels offrant des fonds communs ont été renforcées à cet égard en 2015 par la phase 2
du Modèle de relation client-conseiller (MRCC 2), sans que les fonds distincts ne soient inclus dans cette réforme. «Les travaux actuels se traduiront éventuellement par la publication en
consultation d’un encadrement normatif et réglementaire», a indiqué Sylvain Théberge, directeur des Affaires publiques et
des communications au sein de l’Autorité, dans un courriel à Conseiller.ca.
Tiré de finance-investissement.com
 








































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