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 INDUSTRIE
GARE AUX ANGLES
MORTS DE LA NÉGOCIATION
Des conseillers risquent de négocier des FNB sans disposer de l’information complète.
Par Guillaume Poulin-Goyer
Lorsque la TSX cesse de fonctionner, cela crée une réaction en chaîne d’assèchement de la liquidité.
– Patrick McEntyre
Au Canada, la plupart des fonds négociés en Bourse (FNB) se négocient sur des marchés fragmentés. Au cours d’une même journée, un même FNB peut se négocier sur 13 Bourses et systèmes de négociation parallèle (SNP) différents. Pourtant, certains outils qu’utilisent les conseillers ne présentent pas toute l’information provenant de ces marchés, les privant ainsi de données qui leur permettraient de mieux négocier les FNB.
Le problème vient de la manière dont les conseillers et investisseurs de détail consultent l’information quant au prix et au volume d’un FNB. Selon NEO Bourse (NEO), tous les investisseurs particuliers et plus de 90 % des conseillers en placement ont accès à de l’information de marché relative aux titres inscrits à la Bourse de Toronto (TSX) et la TSX-V, parce qu’ils l’obtiennent auprès de l’intermédiaire d’un fournisseur qui ne présente que ce qui se passe sur la TSX et la TSX-V. Leur firme de courtage économise ainsi les frais pour obtenir les données de marché en temps réel provenant des autres systèmes de négociation.
« Souvent, les investisseurs peuvent trouver le cours exact d’un titre ou son cours coté à titre indicatif – y compris des données en temps réel et différé – sur certaines plateformes, telles que Thomson One, Yahoo et Google Finance. Le défi pour les investisseurs est de trouver une représentation exacte du volume total sur l’ensemble des marchés. Bien que la
TSX reçoive souvent toute l’attention, elle ne constitue pas le seul marché au Canada », lit-on dans un document de
BMO Gestion mondiale d’actifs.
Les FNB cotés à la TSX peuvent se négocier sur différentes Bourses et SNP. Or, une large partie et souvent la majorité du volume de ces titres sont négociés sur d’autres plateformes. Par exemple, en mai 2020, 42 % du volume des FNB cana- diens a été négocié sur une plateforme appartenant à la TSX, 35 %, sur une plateforme appartenant au NASDAQ, et 18 %, sur une plateforme de NEO, selon cette dernière entreprise. Le reste du volume a passé sur d’autres SNP.
Pour les FNB de certains manufacturiers, la part du volume de négociations de la TSX est encore moindre. Par exemple, en mai, 16 % du volume des FNB de RBC Gestion
mondiale d’actifs allait à la TSX, alors que c’était le cas pour 18 % des FNB d’Invesco, selon NEO.
« Un intervenant qui n’en est pas pleinement informé peut juger qu’un FNB a l’air bien, mais ne pas y investir parce qu’il croit à tort qu’il ne se négocie pas suffisamment », dit Jos Schmitt, président et chef de la direction de NEO.
Il milite depuis des années pour que les régulateurs rendent obligatoire la diffusion à tous les investisseurs des données de marché consolidées, car la situation actuelle nuit non seulement à l’information des investisseurs, mais peut également nuire à l’ensemble du marché, comme lors de l’in- terruption de la TSX du 27 février 2020.
Ce jour-là, en après-midi, un enjeu de capacité du système a causé l’arrêt de la négociation sur la TSX, la TSX-V et la TSX Alpha. « Plus de 90 % des conseillers en placement et 100 % des
investisseurs particuliers étaient sans information et ont quitté le marché, alors que les investisseurs professionnels, munis de données de marché consolidées, continuaient à traiter sur les autres plateformes. Le volume d’activité de négociation était à environ 20 % de ce qu’il est en temps normal », explique Jos Schmitt.
Cette situation a créé une sorte de cercle vicieux, explique Patrick McEntyre, directeur général, négociation électronique, Financière Banque Nationale : « Le flux de volume passif provenant des investisseurs de détail tend à être envoyé à la TSX. Alors, lorsque la TSX cesse de fonctionner, cela crée une réaction en chaîne d’assèchement de la liquidité. Les négocia- teurs institutionnels ont perçu qu’ils n’avaient plus un portrait complet de ce qui se passait. Les négociateurs étrangers, qui ont souvent seulement accès aux données de la TSX, ont aussi réduit leurs activités ou les ont arrêtées.»
Ce cas est donc plus qu’un problème de diffusion de données, poursuit-il : « C’est la perception que la TSX est l’endroit où les prix sont établis, car bon nombre d’investis- seurs dépendent de la TSX pour obtenir leur information.»
Selon Jos Schmitt, pareil événement serait passé inaperçu aux États-Unis, où tout un chacun a d’emblée accès aux
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ILLUSTRATION: FI / AVEC DES ÉLÉMENTS DE ISTOCKPHOTO
10 Guide des FNB 2020 de Finance et Investissement










































































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