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  12 | FINANCE ET INVESTISSEMENT PLANIFICATION DE LA RETRAITE Mi-novembre 2020
   La valeur du report du versement
de la rente du RRQ
Tableau 1 : Rente payable
    ANNÉES DE PARTICIPATION AU RRQ À 60 ANS
 ÂGE DE DEMANDE
   25
  30
  36
 40
  44,25
 60
    6493$
   7692$
   9030$
  9030$
  9030$
61
  7012$
 8338$
 9897$
10046$
 10046$
 62
   7504$
  8950$
  10662$
 11062$
  11062$
 63
   7971$
  9530$
  11386$
 12078$
  12078$
 64
   8397$
  10060$
  12048$
 13094$
  13094$
 65
   8819$
  10583$
  12699$
 14110$
  14110$
 66
   9364$
  11237$
  13485$
 14983$
  15295$
 67
   9888$
  11866$
  14239$
 15821$
  16480$
 68
   10392$
  12470$
  14964$
 16627$
  17666$
 69
   10855$
  13026$
  15631$
 17367$
  18851$
 70
    11320$
   13584$
   16301$
  18112$
  20036$
SOURCE: CONFOR FINANCIERS INC. TABLEAU: FINANCE ET INVESTISSEMENT
   Bien la chiffrer peut aider le client à évaluer ses options.
PAR MARTIN DUPRAS*
perspective retraite
en planification de la retraite,
on se demande souvent quel est l’âge idéal pour toucher la rente du Régime de rentes du Québec (RRQ). La réponse n’est pas univer- selle et dépend de la situation personnelle de chaque client. Cependant, un conseiller qui chiffre, chaque année, l’effet qu’a le report d’un an du moment où son client demande le versement de sa rente peut l’aider à choisir potentiellement une option profitable.
Ainsi, l’âge idéal pour toucher la rente du RRQ est une question complexe, notamment parce que la réponse sera influencée par bon nombre de considérations, dont:
• L’espérance de vie du particulier, son espérance de vie statistique (basée sur son âge, sa santé, ses habitudes de vie, etc.) et sa perception de son espérance de vie. Par exemple, celui-ci pourrait se dire : « Chez nous, on meurt tous à 70 ans» ou «Mes chums meurent tous à 70 ans».
• Les besoins de revenu du particulier et son accès à différentes sources de revenus. La décision sera bien différente pour celui qui a des REER, CELI ou autre et pour celui qui n’a que les rentes gouvernementales pour survivre.
• Le rendement attendu des placements de celui qui en possède.
• Le nombre d’années cotisées au RRQ et l’historique des salaires du particulier.
• La présence de considérations successo- rales, notamment pour le célibataire qui n’a pas d’enfant ou qui a des enfants majeurs.
• La gestion du risque de survie.
• La perception même du RRQ. Certains pourraient notamment craindre des modifi- cations éventuelles au régime.
• De vieux ouï-dire. Par exemple, c’est le cas lorsque le client pense: «On m’a toujours dit de toucher cette rente dès que possible».
• Le mimétisme : soit la reproduction machinale, inconsciente, de gestes et d’atti- tudes des gens de l’entourage.
Ces considérations, et d’autres, font par- fois que même devant la meilleure analyse et les meilleures recommandations possibles, le particulier peut baser sa décision sur des considérations non financières.
L’Institut canadien des actuaires (ICA) publiait en juillet dernier une analyse très étoffée de cette question intitulée «Décision relative au début des prestations du Régime de pensions du Canada (RPC)». Cette ana- lyse portait sur le RPC et même s’il est vrai que des différences existent entre le RPC et le RRQ, sa conclusion peut être retenue. «Dans l’ensemble, pour la majorité des Canadiens qui ont suffisamment d’épargne dans un REER ou un FERR pour accroître leur revenu de retraite annuel garanti, la bonne décision relative au report des prestations du RPC dé- pend du rendement actuel des placements et de l’espérance de vie. Compte tenu des faibles taux d’intérêt actuels et des attentes de longévité de la population en général, le présent document conclut que le report des prestations du RPC est manifestement une stratégie avantageuse sur le plan financier.»
Lors du dernier congrès de l’Institut québécois de planification financière (IQPF), qui s’est déroulé virtuellement les 24 et 25 septembre dernier, je présentais éga- lement une analyse sur ce sujet.
Cette dernière était basée sur les hypo- thèses suivantes: un particulier de 60 ans, dont les salaires passés ont toujours dépassé
le maximum des gains admissibles (MGA), cesse de travailler après 59 ans. Le calcul de la réduction du RRQ, avant 65 ans, est exact, soit 0,50% + 0,10% X rente du participant / rente maximale. Seul le régime de base du RRQ est considéré et les chiffres sont présentés sans aucune inflation ou croissance du MGA.
Les deux tableaux suivants sont tirés de cette présentation. Le tableau 1 intitulé « Rente payable » montre, selon le nombre d’années cotisées au RRQ à 60 ans, la rente que le particulier pourrait recevoir selon l’âge de la demande. Notons que la dernière colonne ombragée est fournie ici pour il- lustrer les rentes maximales, mais remar- quons qu’il n’est pas possible d’avoir cotisé 44,25 années au RRQ à 60 ans.
Utilisons la colonne de 40 ans de cotisa- tions, soit l’avant-dernière. On constate que si le particulier demandait sa rente à 65 ans, il recevrait, selon nos hypothèses, 14110$ par année. Sans surprise, s’il choisissait de tou- cher cette rente à 60 ans, elle serait réduite de 36% (7,2% par année) pour atteindre 9 030$.
La conclusion pourrait être la suivante : ce particulier qui, à 60 ans, choisit de ne pas toucher sa rente et la reporte d’une seule année, donc la touche à 61 ans, évite une pé- nalité de 7,2% (de 60 à 61 ans).
On a parfois tendance à mettre ce chiffre en avant, 7,2%. Or, revenons au tableau, ce particulier qui choisit de ne pas toucher sa rente à 60 ans, mais choisit plutôt de la tou- cher à 61 ans, la verra (sans inflation) passer de 9 030$ à 10046$. Il s’agit plutôt d’une aug- mentation de 11,3% de cette rente. Devant cette hausse potentielle, est-il possible qu’un particulier soit plus enclin à reporter, ne serait-ce que pour un an, sa décision?
«Il est assez plausible que le particu- lier à qui on présente ces mêmes chiffres (réduction d’une année de moins à 7,2% contre une augmentation de rente de 11,3 %) soit interpellé par la recomman- dation utilisant la seconde approche », indiquait-on dans le cahier du partici- pant du congrès de l’IQPF.
> SUITE DE LA PAGE 10
Mes propres analyses mènent à des conclusions similaires (lire « L’illusion de la réserve de liquidités », dans l’édition de Finance et Investissement du 15 novembre 2018). Mon collègue planificateur finan- cier et fiscaliste Benoit Chaurette, conseil- ler en planification financière, Centre d’expertise Gestion privée 1859, avait éga- lement examiné cette approche alors qu’il servait une clientèle principalement com- posée de professionnels. Il observait no- tamment : « Bien que le bucketing puisse par moments bonifier le rendement d’un portefeuille de placement, de manière gé- nérale, une stratégie de rééquilibrage auto- matique du portefeuille de placement of- frira de meilleurs rendements. Après avoir réalisé 1 000 simulations à partir des ren- dements boursiers et obligataires cana- diens, nous arrivons à la conclusion que 85% du temps, une stratégie de rééqui- librage automatique du portefeuille de pla- cement surpassera une stratégie de bucketing. »
S’EN TENIR AU RÉÉQUILIBRAGE
Dans les processus simples d’application, il y a le rééquilibrage régulier pour revenir au portefeuille cible. Le rééquilibrage peut être financièrement pertinent à la fois durant la période de décaissement et durant la période d’accumulation. Le rééquilibrage peut apporter un rendement supérieur de 40 points de base à un portefeuille avec une composante en actions, selon l’Évaluation
Tableau 2 : Bonification par année en %
       ANNÉES DE PARTICIPATION AU RRQ À 60 ANS
 ÂGE DE DEMANDE
   25
 30
   36
 40
  44,25
 60
    s/o
  s/o
    s/o
  s/o
   s/o
 61
  8,0 %
8,4%
  9,6%
11,3 %
 11,3 %
 62
   7,0 %
 7,3%
   7,7 %
 10,1 %
  10,1 %
 63
   6,2%
 6,5%
   6,8 %
 9,2%
  9,2%
 64
   5,3%
 5,6 %
   5,8%
 8,4%
  8,4%
 65
   5,0 %
 5,2%
   5,4%
 7,8%
  7,8%
 66
   6,2%
 6,2%
   6,2%
 6,2%
  8,4%
 67
   5,6 %
 5,6 %
   5,6 %
 5,6 %
  7,7 %
 68
   5,1 %
 5,1 %
   5,1 %
 5,1 %
  7,2%
 69
   4,5%
 4,5%
   4,5%
 4,5%
  6,7%
 70
    4,3%
  4,3%
    4,3%
  4,3%
   6,3%
 SOURCE: CONFOR FINANCIERS INC. TABLEAU: FINANCE ET INVESTISSEMENT
    L’année suivante, on revisitera avec le client l’effet du report d’une année supplé- mentaire du moment du début du verse- ment de la rente de la RRQ.
Le tableau 2, intitulé « Bonification par année en pourcentage », reprend les mêmes chiffres que le tableau 1 mais illustre, pour tous ces cas, l’impact, en pourcentage, du report d’une seule année du début de la rente. Pour celui qui a co- tisé 40 ans au régime à l’âge de 60 ans, le report de 60 à 61 ans augmente la rente de 11,3%. L’année suivante, le report de 61 à 62 ans, s’il en décide ainsi, augmente la rente de 10,1% (la rente passerait de 10 046 $ à 11 062 $). On notera que pour ceux qui ont cotisé peu d’années au RRQ (les colonnes de gauche), la décision de reporter est, en comparaison, moins
actuarielle du Régime de rentes du Québec au 31 décembre 2018.
La mécanique est connue. Lorsque la partie croissance s’envole, son poids en al- location d’actifs augmente, ce qui donne le signal de vendre pour diriger les montants générés vers les titres à revenu fixe. Sans grande analyse complexe, on favorise la vente dans un haut. Inversement, au mo- ment de chute importante du portefeuille d’actions, on transfère des titres à revenu fixe vers la croissance pour acheter dans un creux.
Un rééquilibrage systématique permet d’éviter de tenter de synchroniser le marché. Le transfert d’une catégorie d’actif vers une autre est alors relié à un élément qu’on contrôle, soit la répartition cible liée à la tolé- rance au risque du client.
PRÉVOIR DES REVENUS VIAGERS
En planification de la retraite, on aime bien répondre au besoin de revenus viables. Au cœur de cette préoccupation, la rente viagère est un outil tout désigné pour favoriser l’atteinte de cet objectif. Pour les gens ayant une santé normale et les ressources financières pour combler le vide pendant la période de report, repous- ser les prestations gouvernementales (RRQ/PSV) revalorisées à 70 ans est un conseil très pertinent. L’étude intitulée « Décision relative au début des presta- tions du Régime de pensions du Canada» de l’Institut canadien des actuaires, parle même d’un choix pratiquement « one-size-fits-all ».
profitable en raison du jeu de la «période cotisable » au RRQ.
Quatre constats peuvent être tirés de cette analyse.
1. Le report est fréquemment (mais pas toujours) profitable.
2. L’objectif n’est pas de forcer nos clients à reporter, mais de les amener à considérer ce qui est fréquemment une décision profitable.
3. La décision de reporter d’une année à l’autre (par exemple de 60 à 61 ans et de 64 à 65 ans) n’a pas toujours la même valeur.
4. La décision ne doit pas porter sur 5 ou 10 ans. On la présente au client plutôt chaque année: «On reporte cette année et on s’en reparle dans 1 an.» FI
*A.S.A., Pl. Fin., M. Fisc., ASC, Fellow de l’IQPF, président de ConFor financiers
Certains retraités peuvent compter égale- ment sur le filet de sécurité que leur procure leur régime de retraite à prestations détermi- nées. En l’absence de ces prestations ou si leur niveau reste trop bas, il est de bon conseil d’envisager de consacrer une partie de ses épargnes à la souscription d’une rente viagère commençant à un âge avancé (par exemple, 80 ans et plus). L’achat avec des fonds non enregistrés est plus favorable qu’avec des fonds enregistrés. Toutefois, le ministère des Finances du Canada a proposé un produit de Rente viagère différée à un âge avancé (RVDAA) jusqu’à 85 ans, mais uni- quement pour des sommes enregistrées. Lorsque ce produit sera disponible, il faudra évidemment bien analyser pour que la tarifi- cation ne vienne pas effacer la valeur des at- tributs recherchés.
Combien de notre actif dans ces rentes? La modération a souvent meilleur goût, mais par définition, les gens ayant un excédent d’actif clairement démontré n’ont pas à gérer ce risque de longévité. À l’opposé, les gens à plus faibles revenus pourraient même y consacrer presque 100% de leur actif, n’ayant pas les moyens d’affronter ce risque. Dans les autres cas, disons arbitrairement qu’une part de 25% de notre capital ne me paraîtrait pas hors proportion.
En conclusion, un plan simple, bien exécu- té et révisé périodiquement permet d’éviter les dérives liées aux zigzags de la retraite. FI
*A.S.A., Pl. Fin., directeur principal, Centre d’expertise, Banque Nationale Gestion privée 1859
      
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