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INDUSTRIE
PLUS JEUNES, LES GRANDS UTILISATEURS DE FNB
Les conseillers qui ont le plus recours aux FNB ont
des revenus personnels inférieurs à ceux de leurs pairs.
Par Guillaume Poulin-Goyer
Je m’attends à ce que, parmi les produits gérés qu’utilisent les représentants, la part des FNB augmente graduellement. – Jean Morissette
Les conseillers en placement du Québec qui utilisent davantage de fonds négociés en Bourse (FNB) dans le cadre de leurs activités sont généralement plus jeunes et moins expérimentés
que leurs pairs. Par rapport à ces derniers, ils touchent aussi un revenu personnel inférieur.
Voilà quelques constats qui découlent d’une analyse du profil des grands utilisateurs de FNB parmi les conseillers en placement du Québec ayant participé au sondage mené dans le cadre du Pointage des courtiers québécois 2020.
Pour ce faire, Finance et Investissement a comparé, parmi les
160 répondants, les grands et les petits utilisateurs de FNB. L’actif sous gestion (ASG) des grands utilisateurs de FNB (GU) avait une proportion en FNB égale ou supérieure à 7,4 %, soit la part moyenne en FNB de l’ensemble des répondants. Ceux qui n’étaient pas des GU étaient considérés comme des petits utilisateurs de FNB (PU). Notons qu’environ les trois quarts des 101 «petits utilisateurs» n’utilisaient pas du tout de FNB.
D’abord, les grands utilisateurs de FNB (59 conseillers en pla- cement) tendent à utiliser ces produits en remplacement des titres individuels, que ce soient des actions ou des obligations, montre l’analyse. En effet, l’actif sous gestion (ASG) des GU contient en moyenne 18,3% de FNB, 29,3% d’actions individuelles et 14,3%
de titres à revenu fixe individuels, par rapport à une pondération moyenne de 1%, de 39,1% et de 19,9% respectivement dans l’actif des PU. L’écart entre la part moyenne de l’ASG des GU et des PU au chapitre des liquidités, des fonds communs de placement et des autres types d’outils de placement est faible.
Le profil des GU montre que ceux-ci ont en moyenne 45,9 ans par rapport à 51,4 ans pour les PU. Les premiers ont 16,3 ans d’expé- rience dans l’industrie financière en moyenne par rapport à 21,7 ans pour les seconds.
En moyenne, les grands utilisateurs gèrent moins d’actif (136M$) que les petits utilisateurs (164M$). Résultat, en général, les revenus personnels des premiers sont inférieurs à ceux des seconds, car seulement 19,9 % des GU ont des revenus personnels avant impôt supérieurs à 500000$ comparativement à 33,7% pour les PU.
De plus, les grands utilisateurs de FNB tirent une part plus importante (74,8%) de leurs revenus de production bruts d’une rémunération à honoraires par rapport aux petits utilisateurs de FNB (66,6%). Plus précisément, les GU reçoivent davantage d’honoraires pour la gestion discrétionnaire (41%) que les petits utilisateurs (32,9%).
Pour ce qui est des catégories de titres en portefeuille, de l’âge des conseillers, de leur nombre d’années dans l’industrie, de leurs revenus personnels et de la proportion de leurs revenus à hono- raires, on observe des tendances similaires dans le reste du Canada, d’après le Brokerage Report Card, un sondage analogue mené par notre publication sœur Investment Executive.
La principale différence entre les résultats des deux sondages est que ceux de Finance et Investissement montrent que les femmes conseillères en placement sont surpondérées parmi les plus grands utilisateurs (18,6 %) par rapport aux petits utilisateurs (10,1%) et à la moyenne générale de l’ensemble de l’échantillon (13,3%). C’est
la tendance contraire dans l’échantillon d’Investment Executive où
les conseillères sont sous-représentées parmi les conseillers qui utilisent des FNB.
Crainte dissipée
Nous avons demandé de commenter ces résultats à Mary Hagerman, conseillère en placement et gestionnaire de portefeuille chez Raymond James et elle-même grande utilisatrice de FNB ainsi qu’à Jean Morissette, consultant auprès de l’industrie de la gestion de patrimoine.
D’abord, aucun n’arrive à expliquer la différence entre les deux sondages en ce qui concerne le genre des GU. Le reste des résultats ne les surprend pas.
Il est normal que les conseillers plus jeunes s’intéressent aux FNB, car ceux-ci sont généralement moins méfiants à l’égard de
ces produits que les plus âgés, dit Jean Morissette: «Beaucoup de conseillers plus vieux craignaient le comportement des FNB dans le cas d’une correction. Ils avaient peur que ces FNB deviennent quasi illiquides ou se négocient à trop grand escompte. Étant donné le comportement des FNB durant la dernière correction, cette crainte devrait disparaître.»
De plus, il n’est pas étonnant qu’on retrouve davantage de conseillers rémunérés à honoraires chez les GU.
«Quand on utilise principalement des FNB, pour avoir un business rentable, il faut qu’on soit à honoraires, à moins de les négocier pour générer un revenu de commission, mais ce n’est pas la philosophie des gens qui les utilisent», dit Mary Hagerman. Elle note que la quasi-totalité des FNB ne paient pas de commission de suivi.
Les faibles frais des FNB ont présenté un avantage pour un conseiller en placement qui passait à honoraires et souhaitait articuler sa proposition de valeur. Non seulement, pouvait-il faire valoir que ses honoraires facturés dans des comptes non enregistrés pouvaient être déductibles, mais il pouvait réduire encore plus les frais de détention pour les clients, selon Mary Hagerman.
«Par exemple, selon l’actif géré du client, on pouvait lui faire valoir une économie pouvant aller de 50 à 100 points de base par rapport à la détention d’un fonds commun de placement», illustre-t-elle.
Jean Morissette abonde dans le même sens: «Il y a un intérêt économique. Si un conseiller réussit à enlever 100 points de base en frais de gestion sur 10 ans, [en facturant par exemple un total de 1,50% au lieu de 2,50%] il se positionne différemment en termes de rendement au client.»
Selon lui, de 20 à 30% de l’actif d’un conseiller en placement est composé de fonds d’investissement, car «il y a toujours une caté- gorie d’actif qu’il ne suit pas», en raison du coût et de la complexité de s’y exposer. C’est souvent le cas des revenus fixes américains ou des titres des marchés émergents, où un conseiller préférera se fier à l’expertise d’un tiers.
«Je m’attends à ce que, parmi les produits gérés qu’utilisent les représentants, la part des FNB augmente graduellement à 50% au fur et à mesure qu’il y a une accoutumance, dit Jean Morissette.
Les FNB sont là pour rester.» •
16 Guide des FNB 2020 de Finance et Investissement