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Juin 2020 POINTAGE DES CABINETS MULTIDISCIPLINAIRES FINANCE ET INVESTISSEMENT | 13
Besoin d’écoute et de reconnaissance
envers les conseillers, un sou- tien personnalisé et une meil- leure écoute. Il faudrait privilé- gier le contact humain », dit un répondant.
La transparence est essentielle, note Maxime Gauthier. Lui-même refuse de faire de la survente quand il rencontre un nouveau conseiller. Au contraire, il lui dit ce que fera Mérici pour lui, mais aussi ce qu’elle ne fera pas. «C’est payant, la transparence. Même les mauvaises nouvelles, ça se dit.»
Les conseillers semblent éga- lement à la recherche de stabilité: nombre de détracteurs ont cité l’instabilité des politiques internes parmi les causes de leur insatis- faction. « Quand ils sauront com- ment gérer leur division, je recom- manderai quelqu’un. Il y a trop de changements de politique présen- tement», affirme l’un d’eux.
La rémunération est également un élément clé pour les sondés. « Notre rémunération est trop basse par rapport à la concur- rence», observe l’un d’eux. «C’est toujours le nerf de la guerre », commente Maxime Gauthier.
Faut-il récompenser les meil- leurs vendeurs, miser sur la technologie, ou investir l’argent ailleurs ? Selon lui, la question à poser au conseiller serait plutôt : «Qu’est-cequetuesprêtàfaire pour que je t’en laisse le plus possible ? »
Les représentants accordent une haute importance à la tech- nologie. Ils ont besoin d’outils à la hauteur de leurs attentes et de celles de leurs clients pour rester
conseiller, malheureusement, il n’en manque pas dans l’industrie. On remplace un conflit d’intérêts par un autre. »
Des conseillers sondés s’in- quiètent aussi des effets sur la relève. «C’est la fin de la relève entrepreneuriale. Si au moins l’option "frais modiques" (sur deux-trois ans) était conservée, ça permettrait à la relève d’un peu mieux gagner sa vie en pla- cements. Sans cette commission, elle n’aura d’autre choix que de commencer junior d’un autre conseiller, ou de faire beaucoup d’assurance », note un sondé.
Pour survivre, un conseiller indépendant devra avoir un gros ASA, ce qui n’est pas le cas d’un débutant, à moins d’être lié à un conseiller senior qui l’aide.
De plus, Maxime Gauthier souligne qu’un conseiller recrute souvent des clients qui lui res- semblent. Ainsi, un conseiller de la relève risque d’avoir une clientèle jeune ayant peu d’actifs et devra donc recruter beaucoup de clients pour atteindre un ASA viable.
Ces clients vont évidemment finir par devenir intéressants avec le temps, mais cela ne nour- rira pas le conseiller dans l’im- médiat. Pour cette raison, Flavio Vani juge que c’est une perte d’occasions également, car les conseillers seront obligés de re- fuser ces clients.
LUEUR D’ESPOIR ?
Une minorité de représentants voient pourtant ce changement d’un bon œil. En tout, 9,5% des répondants prévoient une hausse de leur chiffre d’affaires comme un des effets possibles.
«S’il n’y a pas de surprise pour le client, on obtient plus facilement sa confiance», affirme l’un d’eux.
« Ma pratique n’a pas changé.
satisfaits. « Une amélioration de la technologie est requise », in- dique un détracteur. « Beaucoup de choses s’améliorent. Des irri- tants sont appelés à disparaître, notamment la technologie qui est un peu moins à jour », note un répondant.
Même s’ils s’efforcent de bien soutenir leurs conseillers, les courtiers qui en servent un grand nombre ont un taux de recom- mandation moins élevé que les courtiers qui en servent moins.
«C’est plus difficile de contrô- ler l’expérience conseiller dans les grosses firmes, parce que les intervenants sont plus nom- breux»,estimeMaximeGauthier.
D’ailleurs, le fait de ne pas privilégier le recrutement de nouveaux conseillers est vu par certains sondés comme un bon point : « J’aime la proximité et le soutien. On ne fait pas de vo- lume. Il n’y a pas de recrutement de masse. On recherche de l’uni- formité et de la qualité. »
Selon Maxime Gauthier, peu importe la taille du courtier, il faut que la préoccupation première reste : « Est-ce que j’ai encore un lien, est-ce que je peux passer des messages et surtout recevoir des messages de tout mon monde?»
Selon Sylvain De Champlain, iln’yaaucunmauvaisréseau; tout dépend du type de conseil- ler que l’on est. Pour lui, un nou- veau conseiller cherchera un réseau qui l’encadre, alors qu’un conseiller plus entrepreneur sera heureux dans un réseau qui offre davantage d’indépendance. FI
Les ventes sont plus faciles, parce que les gens se sentent moins pé- nalisés s’ils ne respectent pas les critères », confirme un autre dont le courtier a déjà aboli les FAR.
Selon Maxime Gauthier, les FAR devraient être expliqués aux clients et ils offrent au contraire une façon d’être transparent, ce qui favorise la confiance avec les années.
Il admet que certaines firmes ont déjà aboli les FAR, mais sou- vent en mettant en place des me- sures de segmentation favorisant les clients à valeur nette élevée, ce que Mérici et d’autres firmes veulent justement éviter de faire.
Il juge toutefois probable que certains conseillers augmentent leur chiffre d’affaires, car ils se- ront mieux adaptés que d’autres dont ils attireront les clients.
Par contre, Flavio Vani souligne que le nombre de clients riches est limité. Ainsi, tous les conseillers n’en sortiront pas gagnants.
Certains répondants estiment que la disparition des FAR profite uniquement aux gros réseaux. « Les jeunes cabinets seront ex- trêmement touchés par cette situation. La relève se fera plus rare et les grandes institutions auront, une fois de plus, gagné », dit l’un d’eux.
Pour Flavio Vani, ce n’était pas le rôle de l’AMF d’intervenir sur ce point; c’est le marché qui au- rait dû réagir de lui-même.
Pour cette raison, l’APCSF a fait circuler une pétition demandant de ne pas abolir les FAR. Elle a été signée par 4 200 représentants et envoyée à trois ministres du gouvernement du Québec, soit le ministre de l’Économie et de l’Innovation, Pierre Fitzgibbon, le ministre des Finances, Eric Girard, et le président du Conseil du trésor, Christian Dubé. Pour l’instant, aucun d’eux n’a réagi. FI
Les conseillers veulent être entendus.
PAR ALIZÉE CALZA
pour être à l’aise de re-
commander sa firme à un autre conseiller, un représentant a be- soin de se sentir soutenu et re- connu par elle.
C’est ce que démontre le Pointage des cabinets multidisci- plinaires, qui publie pour la pre- mière fois le taux de recomman- dation net (net promoter score ou NPS). Ce taux est un outil d’éva- luation de la fidélité et de la satis- faction des conseillers.
Pour le calculer, nous avons demandé aux sondés la proba- bilité qu’ils recommandent leur firme à un autre conseiller, sur une échelle de 0 à 10. Ceux qui ont donné une note de 9 ou plus ont été classés comme « promo- teurs» et ceux qui ont noté 6 ou moins, comme « détracteurs ».
Le NPS se calcule en sous- trayant le nombre de détracteurs du nombre de promoteurs. Ce ré- sultatestdiviséparlenombrede sondés, puis multiplié par 100, de manière à donner un score entre -100 et 100.
Les organisations ayant un NPS de premier quartile ont un score supérieur à 72, alors que celles de dernier quartile ont un score de
19 ou moins, selon le logiciel de ges- tion de sondage SurveyMonkey. Le score médian est de 43.
Parmi les firmes évaluées, certaines semblent grande- ment satisfaire leurs conseillers, alors que d’autres, moins. Les conseillers liés à Mérici Services Financiers (100), à MICA Cabinets de services financiers (97,6), à Gestion de patrimoine Assante (95) et au Groupe Cloutier (86,1) seraient ainsi en- clins à recommander leur firme.
Force financière Excel (33,3) et SFL Gestion de patrimoine (20,8) obtiennent des taux de recommandation inférieurs au NPS moyen (64,5) des firmes du tableau de la page 11.
Dans l’évaluation de leur firme, les répondants au son- dage accordent une importance prépondérante à l’efficacité des communications de la firme ou du gestionnaire, ainsi qu’au soutien de la firme concernant les changements apportés à la réglementation.
« La communication, c’est souvent ce qui fait défaut dans les réseaux », assure Sylvain DeChamplain,associéetcoach chez Virage Coaching et pré- sident de De Champlain Groupe financier. Selon lui, à l’image de leurs clients, les conseillers cherchent une firme sur laquelle ils peuvent s’appuyer, qui sera transparente et les considérera.
« Je suis heureux, bien entouré. On est une famille. Quand il y a un problème, on communique et on règle la question », souligne par exemple un répondant de type promoteur.
L’important pour un conseil- ler, c’est d’être capable de travail- ler et se développer dans l’envi- ronnement qu’on lui offre, et sur- tout de se sentir soutenu quand les choses sont moins claires, commente Maxime Gauthier, chef de la conformité chez Mérici Services Financiers.
Ainsi, à chaque modification réglementaire, Mérici discute avec chaque conseiller pour ex- pliquer ce que cela va changer et l’objectif des régulateurs. « Même si le conseiller n’est pas content, il se sent respecté. C’est bon pour la relation de confiance », dit Maxime Gauthier.
Les conseillers veulent se sentir respectés et écoutés, et le contraire déplaît, comme le notent des conseillers de type détracteur. « Manque d’écoute et d’ouverture de certains membres de la haute direction. Lacunes sur le plan de la communication de certainesdécisionsayantdesim- pacts sur nos pratiques ou rela- tions clients », critique l’un d’eux.
C’est important pour le conseiller de se sentir respec- té par la firme, d’après Sylvain De Champlain, sinon il s’en ira. « J’aimerais plus de transparence
Segmentation et arbitrage réglementaire en vue
L’abolition des FAR nuira à certains conseillers.
PAR ALIZÉE CALZA
en abolissant les frais
d’acquisition reportés (FAR), l’Au- torité des marchés financiers (AMF) a produit une vague de changements dans les pratiques d’affaires de nombreux conseil- lers. Et celle-ci risque de laisser derrière elle un certain nombre de représentants dont le chiffre d’affaires sera amputé, qui délais- seront certains clients moins ren- tables ou qui réorienteront leurs actifs vers des fonds distincts qui permettent encore les FAR.
C’est ce que révèle le sondage mené dans le cadre du Pointage des cabinets multidisciplinaires. Pour cette enquête, on a deman- dé aux répondants de désigner, parmi une liste de six options, les effets les plus probables sur leur pratique de l’abolition des FAR sur les fonds d’investissement. Les répondants pouvaient men- tionner plusieurs effets parmi cette liste ou aucun d’entre eux.
La moitié des répondants (50,5 %) indiquent « diminution ou aucun changement à votre chiffre d’affaires» comme un des impacts de l’abandon des FAR. Le tiers (33 %) désignent l’« implan- tation de davantage de mesures de segmentation de clientèle (se départir de clients moins ren- tables, fixer un seuil d’actif mini- mum afin d’accepter de servir un nouveau client, etc.)».
De plus, environ un cinquième des sondés entrevoient soit une augmentation des frais que leur courtier facture aux clients ayant le moins d’actif à gérer (20%), soit une augmentation de l’impor- tance de vendre également des produits d’assurance et bancaires auprès du même client (19,6%).
En outre, 11,6% des répondants prévoient réorienter les actifs des clients vers des fonds distincts qui permettent les FAR, afin de maintenir leur compensation.
Même si les FAR sont de moins en moins répandus dans l’indus- trie, ils étaient néanmoins utili- sés par beaucoup de conseillers, principalement ceux qui font leur entrée en carrière et ont peu d’ac- tif sous administration (ASA).
« Je suis en complet désaccord avec la disparition des FAR. La cible n’est pas la bonne, le client sera le grand perdant », indique un des répondants au sondage, traduisant un avis majoritaire. «J’en suis aussi à réfléchir au ni- veau de service, voire à si je peux offrir mes services tout court, à des clients ayant un actif peu im- portant », écrit un autre.
Flavio Vani, président de l’Association professionnelle des conseillers en services financiers (APCSF), n’est nullement étonné que les représentants entendent segmenter leur bloc d’affaires, car servir des clients qui ont moins d’un certain montant d’ASA sera une perte d’argent pour eux.
Les petits épargnants devront donc faire affaire avec des plate- formes à escompte ou de grands réseaux, ou encore s’attendre à payer davantage. « On leur en- lève des possibilités d’amélio-
rer leur sort. On ne crée pas des conditions gagnantes pour aider le petit investisseur à devenir grand ni pour créer de la richesse au Québec », soutient Maxime Gauthier, chef de la conformité chez Mérici Services Financiers. Selon lui, on aurait dû réglemen- ter l’utilisation des FAR plutôt que de les abolir.
L’abolition des FAR engendre un risque réel d’arbitrage réglemen- taire, car une part des répondants songent à réorienter les actifs des clients vers des fonds distincts qui permettent encore les FAR.
Flavio Vani et Maxime Gauthier entrevoient cette possibilité, mais croient qu’elle est mauvaise. « Quand on est en relation avec quelqu’un, on ne peut pas faire n’importe quoi pour son propre intérêt», soutient Flavio Vani.
« On ne devrait pas avoir un arbitrage de produit en fonc- tion de la réglementation, dit Maxime Gauthier. Le seul arbi- trage possible sur le produit de- vrait être par rapport à la conve- nance du client. »
Bien que les régulateurs s’at- tendent à ce que les professionnels ne prennent pas en compte la ré- munération pour leurs affaires, Maxime Gauthier rappelle qu’il s’agit d’une business.
Un répondant appréhende d’autres risques, notamment liés à l’importance de l’offre d’autres produits à un client afin que cette
relation d’affaires
« Le conseiller de
de produit" sera probablement porté à essayer de vendre des plus grosses primes d’assurance pour combler la perte de revenu liée à l’abolition des FAR. Ce type de
reste rentable : type "vendeur