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Un leader de sa génération
Mars2020
aussi, les jeux sont ouverts», signale Dominic Demers.
UNE RELÈVE CHOYÉE
La question de la relève chez S_entiel ne semble pas avoir la même acuité qu’ailleurs, compte tenu de l’âge médian des conseil- lers, qui est de 47 ans. Elle constitue toutefois l’une des préoccupations de l’heure. S_entiel a ainsi créé un groupe informel, dit des «conseil- lers de demain». Ils font partie d’un nombre limité de conseillers d’au plus 15 ans d’expérience ayant des réflexes naturels à l’égard des ventes croisées, de la vente de pro- duits en prestations du vivant, de l’utilisation de propositions élec- troniques et qui ont la volonté de travailler en réseau.
«Dans notre industrie, on ob- serve un retard flagrant dans ces bonnes pratiques d’affaires. Trop de vétérans sont indifférents à cet égard. Nos conseillers de demain seront là dans 20 ans. On organise, à leur intention, des réunions, des formations et parfois des colloques afin de diffuser les meilleures pra- tiques, de susciter des maillages, de stimuler le développement de mar- chés d’entreprises, etc. », précise Dominic Demers.
De fait, ajoute-t-il, les jeunes n’ont pas de réticences à partager leurs expériences et leurs bons coups. «On ne voit pas cela chez les conseillers d’un certain âge. La plupart ne sont pas en mode déve- loppement. Et certains refusent même de recommander des conseillers plus spécialisés qu’eux, de crainte de se faire voler des clients.»
À L’AFFÛT D’ACQUISITIONS
Un agent général de taille moyenne comme S_entiel peut-il continuer de miser sur la croissance interne ? Le marché de demain restera-t-il favorable aux agents gé- néraux n’ayant pas de liens de pro- priété avec les assureurs?
«Nous sommes des acquéreurs potentiels et nos cibles préférées sont les agents généraux associés. Et nous avons la capacité de finan- cement nécessaire pour aller de l’avant », signale le patron de Financière S_entiel.
En outre, la volonté de tenir les rênes est clairement affichée. « Il est évident que les agents généraux indépendants sont moins nom- breux que jamais. Certains assu- reurs font des offres. D’autres, qui n’ont pas de liens de propriété avec des agents généraux, cognent aux portes», dit-il.
«En ce qui me concerne, je n’ai aucune envie de céder la propriété de S_entiel à un assureur ou à une institution financière. Car même si je ne cédais qu’une part de 25%, l’indépendance de la firme serait remise en question », affirme Dominic Demers.
Les prises de contrôle d’agents généraux par des assureurs ne sont pas sans l’inquiéter. «C’est comme une partie d’échecs. On voit que des pièces du jeu se déplacent. Les assureurs et les grandes institu- tions financières ont des res- sources que nous n’avons pas. S’ils le désirent, ils peuvent offrir des bonifications extrêmement éle- vées aux conseillers qu’ils vou- draient recruter. Ils ont également les moyens de favoriser certaines ventes aux dépens d’autres. Ce n’est pas ce que nous voulons. Cela ne serait pas bénéfique pour l’in- dustrie ni pour les clients », conclut-il. FI
   Dominic Demers a fait souffler un vent de renouveau à la Financière S_entiel.
à l’affiche
PAR JEAN-FRANÇOIS BARBE
alors qu’il est gestionnaire
de compte pour l’Empire Vie, Dominic Demers voit se présen- ter la chance d’une vie, en 2009. S’approchant de la retraite, son beau-père, Réal Bolduc, lui pro- pose d’acheter une firme dont il est propriétaire, l’agent général Financière S_entiel.
« Je n’ai pas hésité longtemps. Ma fille venait de naître et je vou- lais être présent dans sa vie. En devenant entrepreneur, j’avais la possibilité d’être à la maison à des heures raisonnables et de voir ma fille grandir », dit Dominic Demers.
L’entrepreneuriat exerçait éga- lement un attrait de longue date. « Plus jeune, j’avais envisagé d’acheter une franchise. Entre autres choses, j’avais rencontré Cora Tsouflidou, la fondatrice de la chaîne de restaurants Cora Déjeuners et dîners », dit-il.
Un entrepreneur, poursuit Dominic Demers, a l’avantage « de décider où amener son entre- prise ». Par contre, ajoute-t-il, travailler pour une institution fi- nancière a un côté limitatif. « Notre sort dépend alors de pro- duits dont les rendements ou l’at- tractivité peuvent ne pas être au rendez-vous. »
UNE NOUVELLE VIE
Après l’obtention, en 2003, d’un baccalauréat en administration des affaires de l’École des sciences de la gestion de l’Université du Québec à Montréal (ESG UQAM), Dominic Demers est recruté par le courtier à escompte TD Waterhouse.
Peu après, il passe quelques mois au service à la clientèle de Valeurs mobilières PEAK, avant d’être embauché par l’Empire Vie à titre de gestionnaire de comptes en produits d’investissement. Il y res- tera près de quatre ans.
«J’aime le monde de la finance. À l’Empire Vie, j’ai eu la chance d’élargir mon expérience et de me familiariser avec certaines réalités des agents généraux. Je suis égale- ment sorti de ma zone de confort, par exemple, en donnant des for- mations à des groupes de 30 conseillers », raconte l’homme de 42 ans.
Cette connaissance du milieu des agents généraux lui sera utile lorsqu’il fera ses premiers pas à la Financière S_entiel, en 2009, au poste de vice-président et directeur du développement des affaires. Afin de faciliter le passage des pou- voirs, Réal Bolduc est resté comme dirigeant pendant trois ans après le début du processus de transmis- sion de l’entreprise.
Peu après son arrivée, Dominic Demers constate que la firme avait connu de meilleurs jours et qu’un changement de cap s’imposait. «La centaine de conseillers en place
PHOTO : MARTIN LAPRISE
«Nous sommes des acquéreurs potentiels et nos cibles préférées sont les agents généraux associés. Et nous avons la capacité de financement nécessaire pour aller de l’avant.» — Dominic Demers
dant l’entrevue], j’ai été skier au mont Avila avec Nathan, mon gar- çon de six ans. Cela dit, je vais aussi travailler sur des dossiers à la mai- son en soirée, mais après les sou- pers en famille», dit-il.
Y a-t-il des façons de diriger une entreprise qui seraient plus typiques des gens de son âge ? «J’aurais tendance à le croire. Par exemple, il n’y a pas de mur entre les conseillers et moi. Ils peuvent facilement me joindre. Peu im- porte la taille de l’entreprise, je crois qu’on devrait toujours trouver le temps de se parler, que ce soit au téléphone ou, à la limite, par
Skype», explique-t-il.
Une des choses qu’il a le moins
appréciées lors de son passage comme démarcheur ou wholesaler était la distance que les directeurs gestionnaires semblaient mettre entre eux et les conseillers. La proximité est d’ailleurs un de ses principaux traits de caractère, comme le souligne son bras droit Frédéric Perman. « Dominic Demers est une personne très ac- cessible, dit-il. Il ne met pas de bar- rière entre lui et les autres. Il ac- corde sa confiance rapidement. Mais attention, cette confiance peut être retirée tout aussi rapide- ment! N’ayant pas de sentiment de supériorité, il met les autres en avant de façon naturelle, ce qui leur donne beaucoup de latitude.»
Selon Dominic Demers, les rap- ports d’égal à égal coïncideraient avec les attentes des conseillers. «Nous nous parlons d’entrepreneur à entrepreneur.» Et cela toucherait davantage encore les conseillers en début de carrière. «Les milléniaux ne veulent vraiment pas être perçus comme des producteurs, mais comme des entrepreneurs», estime Dominic Demers.
PAS D’IDÉES PRÉCONÇUES
Selon Frédéric Perman, Dominic Demers serait également plus sen- sible à l’innovation que la moyenne des dirigeants. « C’est quelqu’un qui n’a pas de paradigmes tout faits et immuables», affirme-t-il.
Le patron de S_entiel se dit à l’af- fût des nouvelles technologies. «De jeunes conseillers m’ont récem- ment approché afin de co-investir dans des projets reposant sur des composantes d’intelligence artifi- cielle. J’y réfléchis», confie-t-il.
Le patron estime que des avan- cées de l’intelligence artificielle permettront, d’ici peu, de faciliter le développement d’affaires. « Le jour n’est pas loin où les systèmes informatiques des agents généraux repéreront automatiquement des occasions d’affaires et amorceront les contacts avec des clients », croit-il.
Mais d’ici là, la firme lavalloise a également d’autres préoccupa- tions. «Nous réfléchissons à divers moyens de faciliter rapidement la vie des conseillers, comme d’offrir des services administratifs plus complets, sous forme d’assistants ou d’assistantes qui travailleraient dans nos locaux», dit-il.
La firme observe également le marché afin de s’inspirer des meilleurs modèles d’entreprise. « Pourrions-nous multiplier nos pistes de vente en étant plus présents sur le Web ? Pourrait-on recourir à des centres d’appels? Là
    ressemblait forcément au dirigeant de la firme. La plupart étaient près de la retraite. Il y avait peu de déve- loppement d’affaires et les revenus reposaient principalement sur l’en vigueur», dit-il.
Une des premières actions de Dominic Demers fut d’introduire la vente de fonds communs de pla- cement. « Je connaissais bien ce secteur. Je ne voyais pas pourquoi un agent général n’offrirait pas ce produit pour une clientèle qui lui échappait», souligne-t-il.
« Nous avons pris une entente avec PEAK afin d’être une succur- sale en fonds communs de place- ment. Les conseillers ont cessé de subdiviser leurs affaires entre les agents généraux. Certains dépo- saient leurs polices d’assurance chez nous, mais plaçaient leurs produits d’investissement avec un autre courtier en épargne collec- tive, ce qui créait une confusion et limitait notre offre de services», ex- plique Dominic Demers.
Il s’est également adjoint deux bras droits, Frédéric Perman, maintenant vice-président au dé- veloppement des affaires, et Lucie de Paola, qui dirige l’équipe des ventes et du marketing.
« Frédéric Perman avait le man- dat de repérer et de recruter des conseillers de moins de 45 ans ayant au moins cinq ans d’expé- rience. Au fil du temps, des conseil- lers plus jeunes ont naturellement trouvé leur place chez nous, car ils y ont reconnu une équipe qui leur ressemblait sur les plans de l’âge et de l’expérience », précise Dominic Demers.
ONZE ANS PLUS TARD
La médiane d’âge des conseil- lers de S_entiel s’établit mainte- nant à 47 ans. Les effectifs ont plus que triplé, la firme comptant au- jourd’hui au-delà de 350 conseil-
lers actifs. Plus nombreux, plus jeunes, plus polyvalents, ceux-ci l’ont entraînée sur le chemin d’une croissance soutenue.
Les cinq premières années de la direction de Dominic Demers ont été particulièrement rythmées. En 2017, le classement Profit 500 classait la Financière S_entiel au 271e rang des 500 champions canadiens de la croissance, avec une hausse de 221 % des revenus sur cinq ans.
«Depuis 2012, notre chiffre d’af- faires affiche une hausse annuelle d’au moins 13%», précise Dominic Demers. La firme revendique 450 M$ d’actifs sous gestion en fonds distincts et 150 M$ en fonds communs de placement.
PRÈS DE SON ÉQUIPE
Dès le départ de l’aventure en- trepreneuriale, il était clair pour Dominic Demers que sa vie profes- sionnelle n’aurait pas préséance sur sa vie familiale. «Lorsque j’étais wholesaler, j’entendais souvent des conseillers dire qu’ils avaient hâte de partir à la retraite afin de passer plus de temps avec les personnes de leur entourage. Ça me faisait réfléchir.»
« Comme les conseillers, un wholesaler est souvent sur la route, poursuit-il. Je pouvais, par exemple, partir à 5h du matin pour me rendre à Sherbrooke et revenir à la maison en fin de soirée. Ce n’était pas le genre de vie que je voulais avoir.»
Comme les gens de sa généra- tion, Dominic Demers est un parti- san de l’équilibre travail-famille ou, dit autrement, de la qualité de vie. «Je me réserve du temps pour faire du sport presque tous les jours, pas uniquement la fin de se- maine. Et je m’occupe de mes en- fants. Par exemple, hier après-midi [c’était un mercredi, le jour précé-











































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