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  6 | FINANCEETINVESTISSEMENT NOUVELLES Février2020
   Certains experts croient qu’ils devraient en parler davantage avec leurs clients, d’autres en sont moins convaincus.
PAR JEAN-FRANÇOIS BARBE
selon un récent sondage,
les consommateurs investiraient davantage dans des produits d’investissement responsable (IR) si leur conseiller ou leur ins- titution financière leur en parlait plus. Les placements en IR ressembleraient-ils à ces gise- ments qui n’attendent que les équipes d’ingénieurs et de mi- neurs pour livrer leurs richesses ?
« Les investissements respon- sables ont la cote auprès des épargnants. Ils en demandent et en redemandent. Il y a nettement un changement de paradigme», dit Gino-Sébastian Savard, pré- sident de MICA Cabinets de services financiers.
Il y a quelques années, les convictions environnementales et sociétales avaient un prix, ex- plique Gino-Sébastian Savard. Les épargnants devaient s’at- tendre à sacrifier quelques points de rendement afin d’investir selon leurs valeurs et préoccupa- tions à l’égard de produits ou ser- vices ayant un impact défavo- rable sur l’environnement ou sur la société en général.
Selon lui, ce temps est révolu. «Les fonds socialement respon-
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Island montréalais. Mais le marché de l’assurance est concurrentiel et la croissance interne demande du temps. Avec Aurrea, on accède à une entreprise en croissance et à un réseau de 1 200 conseillers », explique Phil Marsillo, président d’IDC Worldsource.
« Aurrea a des valeurs qui re- joignent les nôtres. Son implica- tion technologique est significa- tive et elle pourrait servir ailleurs au Canada», ajoute-t-il.
Phil Marsillo a plus de 35 ans d’expérience dans l’industrie. Ce diplômé de l’Université Concordia, parfaitement bi- lingue, a déjà été vice-président principal responsable de la distribution à la Canada Vie.
Pour sa part, Christian Laroche, qui présidait les desti- nées d’Aurrea, portera doréna- vant la casquette de président des opérations québécoises d’IDC Worldsource.
« En 2019, Aurrea a affiché un taux de croissance de 14% et a généré 13 M$ de primes d’assu- rance», indique Christian Laroche.
Les 370 M$ d’actif en fonds dis- tincts d’Aurrea portent à plus de 5,5 G$ celui d’IDC Worldsource.
sables affichent des rendements comparables à la moyenne. Et aujourd’hui, l’information circule rapidement. Les consommateurs sont conscients des impacts né- gatifs de certaines décisions d’en- treprise. Sans être parfaite, l’offre de produits socialement respon- sables s’est suffisamment diversi- fiée pour être très concurren- tielle », affirme-t-il.
UN VIRAGE À FAIRE
Les conseillers parlent-ils suf- fisamment d’IR à leurs clients ? Rien n’est moins sûr.
« Les conseillers n’ont pas encore fait le virage ! » dit Robert Lachance, vice-président des ventes, investissements et retraite au Groupe Cloutier. D’après lui, il arrive souvent que des conseillers demandent da- vantage de renseignements à la suite de requêtes de clients.
« La perception de nombreux conseillers est biaisée. Ils s’inter- rogent sur la performance des fonds socialement responsables. Or, cela ne devrait pas faire débat. Outre le fait que ces fonds affichent des rendements inté- ressants, ils ont le grand avan- tage de protéger les portefeuilles contre les risques environne- mentaux », explique Robert Lachance.
« Imaginons, par exemple, l’impact d’un déversement de pétrole sur le titre d’une société pétrolière. Les consommateurs sont conscients de ces risques », poursuit-il.
« L’investissement responsable n’est ni une mode ni un feu de paille », dit-il avec insistance. En conséquence, les conseillers doivent s’adapter à cette vague de
L’agent général pancanadien sert maintenant plus de 4 000 conseillers indépendants.
ÉVOLUTION DU MODÈLE D’HUMANIA
Il n’y a pas si longtemps, Humania Assurance ne jurait que par son « partenariat straté- gique » avec Aurrea. Son rapport annuel de 2015 le caractérisait comme « le plus important » pour l’avenir de l’entreprise.
Dans un article publié à la une de Finance et Investissement en février 2018, le président et chef de la direction, Stéphane Rochon, soulignait les difficultés des cabi- nets et des courtiers à générer du trafic sur le Web. C’est pourquoi, disait-il, «il est si intéressant d’être proche d’un réseau de distribution, comme nous le sommes d’Aurrea Signature, qui travaille depuis longtemps sur le référencement».
Pourquoi s’être ainsi détaché de ce réseau de distribution ? « Parce que notre modèle d’af- faires a évolué », répond le patron d’Humania.
L’assureur de Saint-Hyacinthe a changé de dynamique en lan- çant, en novembre 2018, le cabi- net virtuel Lead2action.ca. Composé de conseillers en sécu- rité financière salariés, ce cabi- net reçoit des amorces de vente, ou leads, issues de différents partenaires.
fond. « Il faut prendre l’habitude de poser des questions [à ce sujet] aux clients. Souhaitent-ils inves- tir une partie de leur portefeuille dans des produits éthiques ou socialement responsables ? Si oui, un réseau comme le nôtre offre des outils pour faire de bons choix », souligne-t-il.
DES VENTES PERDUES
Le directeur général d’Excel Gestion Privée, Normand Morin, estime que « la majorité des conseillers n’incluent pas encore les produits d’investisse- ment responsable dans leur pra- tique. Toutefois, je constate qu’ils sont de plus en plus nom-
un impact négatif sur l’environ- nement. Nous en tenons compte », affirme Normand Morin.
COMMENT EN PARLER ?
Maxime Gauthier, chef de la conformité du cabinet Mérici Services Financiers, pense lui aussi que les conseillers n’abordent pas suffisamment le sujet de l’IR avec leurs clients. « Les clients veulent, au mini- mum, avoir la possibilité d’inves- tir dans les produits d’investisse- ment socialement responsable », souligne-t-il.
Comment les conseillers pourraient-ils évoquer la ques- tion avec leurs clients ?
Selon Marc Dubuc, représen- tant en épargne collective chez Services en placements PEAK, sa clientèle n’a pas d’intérêt mani- feste pour les produits d’investis- sement socialement responsable. « J’ai plusieurs jeunes clients et rares sont ceux qui mentionnent ce sujet », dit-il.
«L’offre et la promotion des fonds d’IR sont encore très limi- tées, observe Marc Dubuc. Il n’y a pas de formations spécialisées et peu d’information. Par exemple, est-il vrai que les rendements en IR se comparent au reste de l’in- dustrie? À mon avis, la preuve n’a pas encore été faite. »
Le président-fondateur du cabi- net Diversico, Experts-conseils, Daniel Guillemette, partage cette préoccupation. « Je ne suis pas convaincu que les produits d’in- vestissement socialement respon- sable finiront par embraser le pay- sage. Qui peut d’ailleurs garantir qu’ils sont réellement respon- sables, malgré toutes leurs préten- tions?» dit-il.
Daniel Guillemette met égale- ment en doute le désir des inves- tisseurs de réaliser des rende- ments moindres, dans l’éventua- lité où ils opteraient pour des fonds d’IR qui feraient moins bonne figure que la moyenne.
Les conseillers risquent-ils de se couper des milléniaux, les clientèles naturelles des pro- duits d’investissement respon- sable ? « Tant que les milléniaux ne seront pas devenus des in- vestisseurs, l’investissement responsable n’a que peu de chances de s’imposer. Et ça, je ne le vois pas dans un avenir immédiat », déclare le président de Diversico. FI
d’IDC Worldsource Insurance Network.
« Nous avions le choix : soit être propriétaire d’un réseau de dis- tribution régional de taille moyenne, soit participer en tant qu’investisseur minoritaire et stratégique à l’un des quatre plus importants agents généraux au pays », dit Stéphane Rochon.
Grâce à une relation de proxi- mité avec IDC Worldsource Insurance Network, Humania Assurance compte « mieux com- prendre le marché pancanadien et étendre sa capacité de distri- bution hors Québec », signale Stéphane Rochon.
Et l’objectif d’expansion panca- nadienne est d’importance capi- tale, comme l’illustrent les rapports annuels d’Humania, qui mettent constamment l’accent sur ces ré- sultats. Ainsi, en 2018, 38 % des ventes d’assurance individuelle d’Humania Assurance et de sa fi- liale La Survivance-Voyage étaient réalisées à l’extérieur du Québec. En 2015, la proportion était de 31%. La progression suffisait-elle aux dirigeants d’Humania?
La deuxième option s’est fina- lement imposée, car, comme le relève le patron d’Humania, IDC Worldsource Insurance Network a « bien perçu la valeur d’Aurrea ». Les actionnaires de l’assureur maskoutain ont eu le dernier mot. FI
Investissement responsable : les conseillers doivent s’adapter
  Je ne suis pas convaincu que les produits d’investissement socialement responsable finiront par embraser le paysage.
– Daniel Guillemette
« En leur de- mandant, par exemple, si l’in- vestissement so- cialement res- ponsable compte pour eux. Dans 100 % des cas, les clients seront heureux de ré- pondre. Si la ré-
 breux à s’informer des solutions offertes. »
Le dirigeant croit « qu’ils de- vraient d’emblée renseigner leurs clients sur les produits respon- sables qu’ils peuvent offrir. Cela éviterait notamment les achats qui se feraient ailleurs », dit-il.
L’offre s’est sensiblement affi- née au cours des dernières an- nées, précise-t-il. « Des manufac- turiers de fonds nous disent que certains de leurs produits ne sont pas nommément identifiés comme étant socialement res- ponsables, bien qu’ils intègrent certains filtres, par exemple l’ex- clusion de tel ou tel produit ayant
« Si un consommateur va sur Internet afin de se procurer un produit d’assurance de personnes, il y a de bonnes chances qu’il en vienne à communiquer avec ce cabinet virtuel. Ce qui n’était qu’un projet pilote a dépassé nos attentes en matière de ventes », explique Stéphane Rochon.
« Lead2action nous permet d’être directement impliqués au
ponse est négative, il n’y aura pas d’impact. Si elle est positive, le conseiller cherchera alors à dé- terminer ce qui a de l’impor- tance aux yeux du client, comme pourrait l’être, par exemple, la présence des hydrocarbures dans ses produits d’investisse- ment », explique Maxime Gauthier.
« Dans tous les cas, ce ques- tionnement fait que les clients s’intéresseront davantage à leur portefeuille », dit-il.
LE TEST DE LA RÉALITÉ
Sur le terrain, un certain scep- ticisme demeure à l’égard de l’IR.
lers indépendants. Trois ans plus tôt, en 2015, la proportion était de 22 %.
Autre facteur lié à la vente d’Aurrea : Humania a élargi sa capacité de distribution à l’égard d’une clientèle convoitée à la suite de l’acquisition, l’été der- nier, de Tour+Med, un spécia- liste de l’assurance voyage.
« Tour+Med rejoint les baby-boomers et
    Les consommateurs d’aujourd’hui n’achètent plus et n’achèteront jamais plus comme ceux d’hier.
– Stéphane Rochon
les retraités, un marché que nous pourrons mieux servir par son en- tremise », signale celui que l’article de Finance et Investissement de février 2018 dési-
cœur de l’action. Car, il faut bien le dire, les consommateurs d’au- jourd’hui n’achètent plus et n’achèteront jamais plus comme ceux d’hier », affirme-t-il.
En d’autres termes, la question de la vente d’Aurrea s’est posée alors qu’Humania avait dévelop- pé ses propres moyens d’action sur Internet, là où les ventes se déplacent peu à peu et sans retour.
Selon son dernier rapport annuel, 61 % des ventes en assurance individuelle d’Humania Assurance au cours de l’année 2018 se sont faites en ligne par l’entremise de conseil-
comme « Monsieur
gnait innovation ».
Par exemple, Humania pour- rait éventuellement faire valoir, auprès des clients de Tour+Med, certains de ses produits, comme l’assurance cancer 5575. L’assu- reur maskoutain pourrait égale- ment créer de nouveaux produits à leur intention.
DÉVELOPPER LE MARCHÉ CANADIEN
Un troisième et dernier motif a guidé les décideurs d’Humania : la possibilité de mieux dévelop- per le marché canadien en ratta- chant un wagon à la locomotive


























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