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  8 | FINANCEETINVESTISSEMENT NOUVELLES APEXA entraîne un écrémage
Janvier2020
la progression d’APEXA auprès des AG.
Certains d’entre eux qui y ont adhéré en 2019 ont commencé par y intégrer les dossiers des nouveaux représentants. Dans leurs cas, les dossiers des conseillers sous contrat suivront en 2020. « C’est à cette étape que se posera l’enjeu des conseillers qui vendent peu », dit Adrien Legault.
Par ailleurs, à l’instar du Groupe Cloutier, d’autres AG n’ont pas en‐ core adhéré à APEXA. Pour eux, 2020 sera l’année du passage à cette plateforme. Lorsque leur tour vien‐ dra, ils devront eux aussi envisager la segmentation des conseillers sous contrat.
L’évaluation concerne non seu‐ lement les coûts et la productivité des conseillers inactifs, semi‐actifs ou qui génèrent relativement peu de primes, explique Adrien Legault : « Supposons qu’un agent général effectue son exercice de segmentation. Comment, ensuite, se fera le transfert des contrats et des books d’affaires à d’autres agents généraux? Car rien n’oblige les agents généraux à reprendre toutes les gammes d’activité de conseillers aux contrats résiliés.»
Le milieu des AG se livrera à une réflexion en 2020, selon lui. «Jusqu’à quel point les AG ont‐ils la responsabilité de venir à la res‐ cousse de conseillers absents?» FI
vue de la conduite professionnelle des affaires».
C’est sans compter le risque rela‐ tivement élevé de « divorces » au sein d’une équipe de conseillers.
«Ce n’est pas une solution ma‐ gique. J’ai de la difficulté avec cette incohérence de l’AMF qui n’a pas à nous dire quel modèle d’affaires adopter. Ce faisant, l’AMF avoue qu’elle met une pression sur cer‐ tains modèles d’affaires et que d’autres vont en bénéficier », dit Maxime Gauthier.
L’abandon des FAR risque peu de propulser un arbitrage réglemen‐ taire entre les fonds communs et les autres produits financiers comme les certificats de place‐ ment garanti ou les fonds distincts, selon Hugo Lacroix.
«Est‐ce qu’on craint un exode des capitaux des fonds d’investis‐ sement vers les fonds distincts ? Je serais très étonné qu’on voie cela.» Il n’était pas en mesure de confir‐ mer ou non une éventuelle harmo‐ nisation entre la réglementation des fonds distincts et celle des fonds d’investissement.
Dans un communiqué, l’Institut des fonds d’investissement du Canada indique que «le secteur des fonds d’investissement aurait préféré une approche nationale harmonisée visant à préserver les choix de paiement des investis‐ seurs, assortie d’une transparence absolue en matière de frais».
Par ailleurs, FAIR Canada appuie l’interdiction des FAR. «Ils sont en proie à des conflits d’intérêts, ciblent les investisseurs les plus vulné‐ rables et il existe des preuves solides de ventes abusives », écrit l’orga‐ nisme dans un communiqué.
Selon l’organisme, les clients ne comprennent pas les FAR et leur abolition améliorera le profession‐ nalisme de l’industrie, car les FAR « n’incitent pas [les conseillers] à fournir des conseils et une planifi‐ cation financière continus, puisque le client est bloqué dans le fonds commun de placement pen‐ dant cinq ans ou plus». FI
   Ses coûts font réfléchir les agents généraux.
PAR JEAN-FRANÇOIS BARBE
il y a quelques mois, un
agent général (AG) communiquait une mauvaise nouvelle à des conseillers en sécurité financière sous contrat.
« En vigueur 30 jours après la date de cette lettre, votre contrat sera résilié. Nous vous prions de faire transférer ces contrats et vos affaires dans les 60 jours suivant cette lettre», apprenaient‐ils.
Cet AG, un des plus importants du pays, voulait ainsi concentrer son attention sur les conseillers « pleinement dévoués à leurs pra‐ tiques d’affaires».
Était‐ce là une réaction aux coûts d’implantation d’APEXA, le nouveau portail de traitement des contrats de distribution des conseillers?
Lancé en 2019, APEXA vise à fluidifier les processus de mise sous contrat et de suivi de conformité des conseillers. Les AG assument des coûts pouvant
FAR
> SUITE DE LA UNE
cette province. L’Ontario est la seule province à garder les FAR.
« Je suis consterné et très déçu. C’est une journée noire pour les pe‐ tits investisseurs », dit François Bruneau, vice‐président, adminis‐ tration, de Groupe Cloutier Investissements.
Il déplore que les Autorités canadiennes en valeurs mobilières (ACVM), dont font par‐ tie l’AMF et la CVMO, en viennent à une position non harmonisée.
«Compte tenu de la décision cou‐ rageuse prise en Ontario, je me de‐ mande si le secteur québécois au‐ rait pu être mieux servi par une commission unique dirigée de l’Ontario», lance François Bruneau. Il ne comprend pas pourquoi l’AMF n’a pas profité de la dissidence de l’Ontario pour éviter cette réforme.
«Je suis déçu et en colère!» dit Maxime Gauthier, chef de la confor‐ mitéchezMériciServicesFinanciers.
«J’ai l’impression d’avoir investi beaucoup de temps, de ressources et de capital politique, et [de n’]avoir été aucunement entendu, ajoute‐t‐il. Sur le dossier des FAR, il n’y a rien qui ait bougé, malgré les chiffres et les cas mis en avant. Et malgré les mesures alternatives proposées, qui étaient sérieuses, raisonnables, pragmatiques et ap‐ plicables, et qui permettaient de mi‐ tiger les comportements néfastes.»
Depuis juin 2018, des membres de l’industrie ont proposé aux ré‐ gulateurs bon nombre de mesures d’encadrement des FAR pour éviter leur abolition et afin qu’elles soient bien utilisées. Ainsi, certains sug‐ géraient de remplacer les FAR par des séries à rétrofacturation, pour lesquelles le conseiller et son cour‐ tier auraient le fardeau de payer les FAR si un client rachetait ses parts.
Leurs efforts ont été vains. Après avoir examiné ces solutions, l’AMF
atteindre 75 $ par année et par conseiller.
«Chez certains agents généraux, les frais d’APEXA pourraient repré‐ senter plusieurs dizaines de mil‐ liers de dollars par année », constate Adrien Legault, directeur des finances et chef de la conformi‐ té chez Aurrea Signature.
Les AG doivent également consacrer du temps et des ressources humaines pour inté‐ grer, à la plateforme d’APEXA, diverses données concernant leurs conseillers.
« Vaut‐il la peine de donner du temps à des conseillers semi‐actifs ou inactifs? Et vaut‐il la peine de leur fournir des services coûteux comme la formation ? APEXA entraîne des intervenants du milieu des agents généraux à se poser diverses questions, dont celle de la segmentation des conseil‐ lers», affirme Adrien Legault.
Directrice générale du Groupe SFGT, Caroline Thibeault estime que « sans être la cause unique, APEXA semble forcer certains agents généraux à faire un certain ménage de leurs effectifs».
Pour sa part, Gino‐Sébastian Savard, président de MICA
a conclu que « cet encadrement était peu efficient pour atteindre les objectifs au niveau des enjeux à régler », indique Hugo Lacroix, surintendant des marchés de valeurs à l’AMF.
Selon lui, les séries à rétrofactu‐ ration entraînent un fardeau ad‐ ministratif important: «On ne ga‐ gnait rien à imposer une solution très complexe pour n’arriver qu’à atténuer un risque en partie.»
François Bruneau est en désac‐ cord: «Ce n’était pas une solution si complexe que ça à implanter. Nos partenaires en fonds distincts offrent tous des séries à rétrofac‐ turation. » Selon lui, ces séries réglaient en grande partie les problèmes.
Maxime Gauthier promet de tout faire pour amener l’AMF à changer d’idée. «Ce qui s’est passé en Ontario démontre que le mi‐ nistre des Finances d’une province peut avoir son mot à dire, surtout quand c’est un enjeu de politique publique: permettre au marché de masse d’avoir accès à des conseils financiers», affirme‐t‐il.
Finance et Investissement n’a pas pu obtenir l’avis du ministre des Finances du Québec sur les FAR, bien qu’il le lui ait demandé à plu‐ sieurs reprises depuis novembre 2019.
D’après Maxime Gauthier, les ACVM, sauf la CVMO, ont choisi la voie de l’extrême, en privant d’une solution les clients québécois ayant peu d’actif à investir. Soit ces clients seront « redirigés vers des institu‐ tions financières, soit ils se feront proposer des rentes et des fonds distincts, car ce ne sera pas financiè‐ rement rentable de leur donner de bons services», soutient‐il.
François Bruneau abonde dans le même sens. En 2018, le Groupe Cloutier menait un sondage auprès de ses conseillers. Cette enquête révélait qu’advenant la disparition des FAR, 69 % des représentants dont l’actif sous gestion est supé‐ rieur à 10M$ avaient l’intention de fixer un seuil d’actif minimum afin
Cabinets de services financiers, croit voir dans ce mouvement vers la segmentation une justification de son modèle d’entreprise.
«Je comprends nos concurrents qui veulent segmenter leurs groupes de conseillers en se déta‐ chant de ceux qui ne produisent pas ou peu. Les modèles d’affaires basés sur n’importe quoi tirent à leur fin. APEXA nous y amène!» lance‐t‐il.
«Le milieu des agents généraux se dirige vers l’écrémage des conseillers», dit Yan Charbonneau, président et chef de la direction d’AFL Groupe Financier.
Selon lui, APEXA fait réfléchir sur l’atteinte des objectifs de renta‐ bilité: «On ne peut plus repousser la réflexion sur les conditions de rentabilité. Les exercices annuels de segmentation des conseillers pourraient s’imposer dans l’industrie.»
À L’OMBRE DE LA CONFORMITÉ
Des AG attribuent une autre cause à cette segmentation : leur gestion, de plus en plus impor‐ tante, de la conformité des conseillers.
d’accepter de servir un nouveau client. Dans ce groupe, 40 % di‐ saient avoir l’intention de placer ce seuil à 100 000$.
Selon François Bruneau, des conseillers pourraient aussi servir ces clients, mais leur facturer plus de 1% en honoraires basés sur l’ac‐ tif investi, afin de se faire rembour‐ ser rapidement les frais initiaux d’analyse de la situation financière. Le client ayant peu d’actif à investir payera donc plus cher.
Hugo Lacroix croit plutôt que les conseillers ont maintenant des ou‐ tils technologiques qui leur per‐ mettent d’offrir leurs services à des coûts d’exploitation beaucoup plus faibles que par le passé. «Cette mo‐ dernisation a apporté des gains d’efficience. Les conseillers sont moins dépendants d’une structure de rémunération qui apporte son lot de problèmes», dit‐il.
«L’offre de conseil sans discrimi‐ nation pour le montant minimum d’investissement, pour nous, est assez abondante dans le marché», ajoute Hugo Lacroix.
Entre autres parce que les FAR représentent une part en diminu‐ tion des revenus des courtiers in‐ dépendants, Hugo Lacroix ne croit pas que leur abolition « génère un impact matériel sur les courtiers en épargne collective, même ceux de plus petite taille».
L’AMF publiera des modifica‐ tions réglementaires définitives au début de 2020. Il y aura une période de transition d’au moins deux ans, si bien que l’abolition n’entrera pas en vigueur avant 2022.
À compter de la date de prise d’effet de l’interdiction des FAR, il ne sera plus possible d’en offrir au Canada, sauf en Ontario. L’AMF permettra de laisser courir les ca‐ lendriers de rachat avec FAR jusqu’à échéance pour les acquisi‐ tions réalisées avant cette date.
MODÈLE D’AFFAIRES ATTAQUÉ
L’interdiction n’entraînera pas un exode au sein de la profession,
« Les responsabilités des agents généraux en matière de conformité augmentent et continueront à aug‐ menter. APEXA peut forcer les agents généraux à évaluer la pro‐ duction des courtiers ou, à tout le moins, à avoir des conversations avec les courtiers. Il y a une ten‐ dance de plus en plus forte à la ra‐ tionalisation », dit Roger Boulos, directeur général du Groupe Financier Boulos.
L’arrivée d’APEXA fait ressortir de graves enjeux en conformité, d’après Dominic Demers, pré‐ sident de la Financière S_entiel : «APEXA constitue un premier pas vers l’imputabilité aux agents géné‐ raux de la conformité des con‐ seillers. Cet outil nous est imposé par les assureurs qui veulent s’assurer de la conformité de nos conseillers.»
« Le jour où l’on deviendra juridiquement responsables et imputables sera celui où nous in‐ viterons des conseillers inactifs et semi‐actifs à quitter notre organi‐ sation. Et ça s’en vient!» prévient Dominic Demers.
Les lettres de résiliation de contrats pourraient être plus nombreuses en 2020 en raison de
d’après Hugo Lacroix. La solution au problème de relève de conseil‐ lers résiderait notamment dans la formation d’équipes, selon lui.
« Si les conseillers ne changent rien à leurs façons de faire, il est possible que ce soit plus difficile d’avoir de la rémunération dans les prochaines années. Mais si les firmes de courtage prennent un peu plus de responsabilités et de leadership dans la manière dont elles accompagnent leurs plus jeunes conseillers et les font intera‐ gir avec les conseillers d’expé‐ rience, si elles forment des équipes de travail et repensent la distribu‐ tion des revenus à l’intérieur de leur firme, ça va avoir un effet posi‐ tif sur la résilience de leur force de vente», indique le surintendant.
Les conseillers en fin de carrière apprécieraient le soutien de recrues et ces dernières bénéficieraient de l’expérience des premiers, selon lui. L’industrie devrait emprunter cette voie «plutôt que de rester dans une mentalité de conseillers auto‐ nomes», ajoute Hugo Lacroix.
«Ce n’est pas tout le monde qui est fait pour travailler en équipe. De s’imaginer que tout le monde va faire cette transition, c’est exagéré et nettement déconnecté de la réa‐ lité», réplique François Bruneau.
Il se dit en désaccord avec cette vision: «Ça revient à dire: “Votre modèle d’affaires n’est plus bon. Tu changes ou tu meurs!” »
Selon François Bruneau, la force des conseillers qui travaillent avec sa firme n’est pas nécessairement de développer une relève et de la coacher, mais plutôt de servir leurs clients.
Résultat : les « loups solitaires » auront de la difficulté à vendre leur clientèle et les courtiers devront supporter davantage de coûts et de risques pour gérer leur relève, selon lui.
Maxime Gauthier est du même avis. Former des équipes peut être «difficile pour des raisons géogra‐ phiques et parce qu’il y a des inco‐ hérences sur le plan des points de
     

























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