Page 6 - Newcom
P. 6

  6 | FINANCEETINVESTISSEMENT NOUVELLES Septembre2020 Coûteuses réformes en vue
   On sera plus attentif à la qualité du travail des conseillers.
PAR GUILLAUME POULIN-GOYER
réexamen des conflits
d’intérêts, révision des mesures incitatives à la vente, augmenta- tion des coûts de conformité. Voilà entre autres à quoi se préparent les services de conformité des courtiers du secteur des valeurs mobilières afin d’ajuster leurs pratiques d’affaires aux réformes axées sur les clients.
C’est ce que révèle le sondage mené dans le cadre du Pointage des régulateurs 2020, en janvier et février derniers. À cette occa- sion, Finance et Investissement a demandé à des responsables de la conformité de déterminer, parmi six énoncés, les changements les plus susceptibles de survenir dans leur entreprise à la suite de l’entrée en vigueur, en 2022, des nouvelles mesures d’encadrement découlant des réformes axées sur les clients.
Parmi ces réformes, on note une nouvelle exigence, soit de donner préséance aux intérêts des clients. Les nombreuses nouvelles obliga- tions touchent aussi la connais-
Régulateurs
> SUITE DE LA UNE
des courtiers de fonds mutuels
(ACFM).
Ce document a été rédigé à la
suite de rencontres informelles ef- fectuées avec « une grande variété de groupes d’intervenants» invités à s’exprimer sur le cadre actuel.
«Les groupes et associations sec- toriels ainsi que les groupes de dé- fense des investisseurs ont tous ex- primé le souhait de voir le cadre ré- glementaire actuel modifié, compte tenu de l’évolution de l’environne- ment commercial, des besoins et des attentes des clients», y lit-on.
Certains intervenants déplorent que de maintenir l’OCRCVM et l’ACFM continue de créer un dé- doublement des coûts de confor- mité et de donner lieu à des inter- prétations différentes de règles similaires. D’autres jugent que le cadre actuel fait que les clients ne peuvent pas accéder à une large gamme de produits auprès d’un seul représentant ou ne savent pas à qui s’adresser en cas de problème.
Toutefois, le cadre à deux OAR a l’avantage de donner aux clients l’accès à deux fonds de protec- tion et à des règles adaptées. «Par exemple, les courtiers membres de l’OCRCVM peuvent offrir à leurs clients la possibilité de négocier
sance du client et du produit ainsi que l’évaluation de la convenance.
Les 72 répondants pouvaient cerner autant de changements per- tinents qu’ils le souhaitaient parmi la liste d’énoncés ou aucun d’entre eux. Résultat : 38,9 % des sondés jugent que certaines formes de rémunérations disparaîtront.
« Beaucoup d’accent est mis sur les conflits d’intérêts liés à la ré- munération. Notamment, la com- mission à frais d’acquisition repor- tés pour les fonds communs sera abolie», note un répondant.
« De plus en plus, la rémunéra- tion passera des commissions aux honoraires», prévoit un autre.
Plus du tiers des sondés (38,9%) entendent éviter que certains pro- duits ne procurent une rémunéra- tion supérieure. «On est contre des produits plus payants que d’autres, en raison de l’apparence de conflits d’intérêts. Ça devrait être dénon- cé», dit un troisième répondant.
De plus, 30,6 % des répondants anticipent que leur courtier liera une partie de la rémunération variable des conseillers à leur conformité aux politiques et aux procédures internes.
«Tout converge vers un seul but: joindre la rémunération au mérite, sans nécessairement la joindre au volume. En ce moment, elle est strictement liée au volume. Les
des valeurs mobilières et d’autres produits de placement sur marge ou d’effectuer des opérations ins- titutionnelles ou pour compte propre; ils sont donc exposés à des risques généralement plus com- plexes que ceux auxquels font face les courtiers membres de l’ACFM», d’après le document.
ATTENTES DES ACVM
Les ACVM ont des attentes quant au nouveau cadre. Ainsi, celui-ci réduirait au minimum les redondances n’apportant au- cune valeur sur le plan réglemen- taire et les possibilités d’arbitrage réglementaire.
Au 31 décembre 2019, il y avait 169 courtiers actifs membres de l’OCRCVM et 88 courtiers actifs membres de l’ACFM, dont 25 à double plateforme. Ces derniers doivent maintenir deux systèmes de conformité, lesquels nécessitent des systèmes de technologie de l’information administratifs dis- tincts. Ils doivent aussi cotiser à deux fonds de protection.
De plus, le cadre actuel permet qu’un fonds commun de place- ment soit vendu par les courtiers en épargne collective, les cour- tiers en placement et les cour- tiers sur le marché dispensé. Ces trois groupes étant soumis à des règles et à une surveillance dif- férentes, cela « peut entraîner un traitement non uniforme des
formes vont être analysées. Les frais de vente différés seront abo- lis», estime un autre répondant.
« Il y a beaucoup de documents à remplir, côté conformité. Pour s’assurer que c’est bien fait, on se demande si une partie du bonus sera liée à la qualité du travail», dit un autre.
En outre, 27,8% des répondants prévoient que certaines cibles de ventes vont être abandonnées ou seront moins contraignantes. Le quart d’entre eux envisagent que leur courtier reportera d’un délai raisonnable le paiement d’une par- tie de la rémunération du conseil- ler afin de s’assurer que leur travail est conforme. Seulement 15,8 % entrevoient que la direction de leur courtier réduira la proportion de la rémunération variable du conseiller par rapport à sa rémuné- ration totale.
SEGMENTATION ET TRAVAIL PLUS LONG
Les réformes axées sur les clients risquent d’alourdir de nouveau le fardeau réglementaire et Finance et Investissement a voulu en connaître les effets. Encore une fois, les 72 répondants pouvaient déter- miner, parmi sept effets possibles, lequel ou lesquels seraient les plus probables de survenir dans leur entreprise.
personnes inscrites exerçant des activités similaires ». C’est sans compter qu’un conseiller membre de l’ACFM pourrait hésiter à de- venir membre de l’OCRCVM, car ce dernier OAR n’autorise pas le versement de commissions à la société par actions personnelle d’un représentant.
Le nouveau cadre doit offrir aux clients un accès homogène à des produits et à des services similaires, et laisser place à l’innovation tout en protégeant les investisseurs, souhaitent les ACVM. L’un des problèmes découle de l’accès iné- gal aux fonds négociés en Bourse (FNB) entre les courtiers en place- ment et les courtiers en épargne collective. Bien que ces derniers puissent conclure une entente de service avec un courtier membre de l’OCRCVM ou conseiller au client d’acheter des titres d’un fonds d’in- vestissement qui englobe des FNB, ces solutions sont peu pratiques, généralement plus coûteuses pour l’investisseur et, par conséquent, inefficaces, selon le document des ACVM. Selon un OAR consulté par les ACVM, la structure actuelle interdit aux courtiers en épargne collective d’exercer un pouvoir de négociation discrétionnaire pour le compte de clients, ce qui les em- pêche de créer certains modèles d’entreprise.
De plus, la structure actuelle n’a pas laissé suffisamment de lati- tude pour permettre aux modèles d’affaires d’innover en offrant des services de placement en ligne ou des conseils hybrides humains/ numériques.
Par ailleurs, les ACVM espèrent que le nouveau cadre réglementaire soit facilement compréhensible pour les investisseurs et les protège de manière appropriée, notam- ment avec un mandat d’intérêt
En tout, 75 % des sondés pré- voient une hausse des coûts de conformité. Et, 63,9 % anticipent que les conseillers segmenteront davantage leur bloc d’affaires en y éliminant les clients les moins ren- tables. La moitié des répondants jugent que le travail du conseiller sera plus compliqué et plus long ou que les firmes de courtage auront davantage de difficulté à recru- ter et retenir des conseillers de la relève.
« Le conseiller devra travailler plus et ça va coûter plus cher», note un répondant, dont l’avis est large- ment partagé.
« Les petits clients vont devenir moins rentables, donc on va se concentrer sur une clientèle plus aisée», complète un sondé.
«Tout est lié aux résultats de la firme. Si on veut continuer à avoir une rentabilité, il faudra segmen- ter davantage », ajoute un autre répondant.
«Le temps consacré à mon client est passé du double au triple. Je vais devoir probablement segmen- ter davantage ma clientèle pour compenser ces pertes », dit ce sondé qui semble avoir aussi un permis de représentant.
Plusieurs répondants déplorent les défis croissants pour la relève. « Les gens vont se tourner vers des produits qui vont générer des
public clair et transparent assorti d’une structure de gouvernance efficace.
Au dire d’intervenants consul- tés, « la structure de gouvernance des OAR ne favorise pas suffisam- ment l’exécution de leur mandat d’intérêt public du fait qu’ils sont dotés de conseils d’administration trop proches du secteur des valeurs mobilières et qu’ils ne disposent pas d’un mécanisme officiel per- mettant de tenir compte des com- mentaires des investisseurs».
Selon les ACVM, le nouveau cadre devrait leur favoriser un accès rapide et efficace aux don- nées sur les marchés afin d’élabo- rer des politiques appropriées et bien gérer le risque systémique.
«Des intervenants se disent pré- occupés par de possibles lacunes en matière d’information et la fragmentation de la visibilité du marché qui pourraient résulter du fait d’exclure les autorités en valeurs mobilières des fonctions de surveillance du marché», lit-on dans le document.
La consultation ne concerne pas la Chambre de la sécurité financière (CSF). Or, son existence est montrée du doigt par une as- sociation qui soutient qu’un ré- gime distinct pour les courtiers en épargne collective au Québec est complexe. « Ces environnements réglementaires qui se chevauchent peuvent accroître la confusion chez les investisseurs et alimenter des divergences de vues concer- nant les fonctions des OAR et leurs relations avec les autorités en va- leurs mobilières », lit-on dans le document.
Une entente de coopération existe donc entre l’ACFM, l’Autorité des marchés financiers et la CSF visant à «faciliter le partage de ren- seignements et la supervision des
commissions pour se constituer un salaire», indique un sondé, qui semble évoquer ici les produits d’assurance de personnes.
«On nous enterre de paperasse et on alourdit nos tâches, ce qui nous empêche de développer notre marché. On élimine ainsi les conseillers qui ne sont pas ca- pables de suivre la machine. Les étudiants qui sortent des univer- sités ont peu de chance de réussir dans les 10 premières années», ajoute un autre.
Un répondant, plutôt négatif, sonne l’alarme du fardeau régle-
  mentaire qui croît sans
« Ces changements ont conséquence une consolidation de notre industrie, une pression à la baisse de la rémunération des acteurs, une concentration des produits maison dans les porte- feuilles, ce qui favorise les manu- facturiers qui sont déjà de grands acteurs. »
Par ailleurs, 47,2% des répon- dants jugent que les clients ac- corderont une importance élevée aux coûts directs et indirects de détention de produits, et 29,2% es- timent que la liste de produits ap- prouvés par leur firme de courtage raccourcira. Seulement 11,1 % des répondants prévoient que les frais de courtage qu’assumera le client seront plus élevés. FI
membres de l’ACFM qui exercent des activités dans cette province».
Les commentaires des parties intéressées sont attendus jusqu’au 23 octobre.
BRAS DE FER OCRCVM-ACFM
Aussi bien l’OCRCVM que l’ACFM ont déjà pris position sur le futur cadre réglementaire.
L’OCRCVM, qui juge l’actuel cadre inefficient, propose de fusionner ses activités avec celles de l’ACFM. Les deux organismes formeraient ainsi les divisions d’un OAR unique.
Dans un mémoire rendu public en juin, l’OCRCVM affirme que, en 10 ans, cette mesure permettrait «d’économiser des centaines de millions de dollars grâce à la réduc- tion des formalités administratives et du fardeau réglementaire en double, et ces sommes pourraient être réinvesties dans l’innovation, le service à la clientèle et la croissance économique partout au Canada».
L’ACFM, qui rejette l’idée de l’OCRCVM, suggère plutôt la créa- tion d’un nouvel organisme chargé de superviser l’ensemble des socié- tés inscrites (courtiers et gestion- naires de fonds), ainsi que le trans- fert de la réglementation du mar- ché au sein d’une entité distincte.
Cette proposition «établit un cadre pour un OAR construit à partir de zéro de manière à bâtir un OAR vraiment moderne doté d’une culture qui met l’intérêt public au premier plan », a dé- claré Mark Gordon, président de l’ACFM. « Il faut régler les pro- blèmes de conflits d’intérêts qui existent entre les mandats des OAR et les intérêts des membres des OAR», affirme-t-il. FI
Avec la collaboration de Guillaume Poulin-Goyer
cesse : pour
    PRÉCISION
Dans l’article intitulé « Pertinente diversification » paru à la une du numéro de juin 2020 de Finance et Investissement, vous pouviez lire : « Du 1er janvier au 25 mai 2020, IG Gestion de patrimoine affiche des ventes nettes de 336 M$ par rapport à 399 M$ en 2019 ».
Il nous apparaît important de préciser que dans le cas des ventes nettes de 399 M$ évoquées pour 2019, il s’agit des ventes nettes enregistrées pour l’en- semble de l’année 2019, et pas uniquement celles du 1er janvier au 25 mai 2019.
  






























   4   5   6   7   8